PRIONS POUR LA FRANCE

Pourquoi Fille Ainée de l'Eglise ?

Ce sont les Papes qui ont donné à la France le titre de Fille Ainée de l’église .

Sainte Pétronille est une des Patronnes de la France. Écoutons le Cardinal. Poupard : Pétronille, vierge romaine, nous est connue par une inscription apposée sur son sarcophage, dans la catacombe de Domitille, à la mémoire de Petronillae, "filiae dulcissima", rapidement attribuée à saint Pierre. Alors que les rapports se resserrent entre le Siège apostolique et la nation franque,

et que le domaine temporel de Saint-Pierre est menacé par les Lombards, les papes Etienne II et Paul Ier se tournent vers la France. Une alliance est conclue sous le signe de Pétronille, qui personnifie dès lors la France chrétienne. Pétronille étant, selon la croyance du temps, la fille de saint Pierre, la France devient la "fille aînée de l’Eglise". A ce titre, Pépin le Bref demande au pape que le corps de Pétronille soit porté au Vatican, qu’un sanctuaire y perpétue son culte, et qu’on y prie pour la nation franque. Ce beau symbole devient le gage des bons rapports entre la France et la Papauté. De fait, alors que les vicissitudes des temps voient se succéder les royautés, les empires et les républiques, ces rapports se sont affirmés et affermis, au milieu même des turbulences récurrentes, au point que le cardinal Secrétaire d’Etat de Jean XXIII, le premier que j’ai servi, voici un demi-siècle, Domenico Tardini, dira, il m’en souvient, à l’un de ses collaborateurs qui appelait à sévir contre je ne sais quels errements : « Caro mio, mon cher, malgré les apparences, le Saint-Siège n’a jamais eu et n’aura jamais d’allié plus sincère que la France ».

Texte complet :

Homélie du card. Poupard :

Monsieur l’Ambassadeur, Excellences,

Chers frères prêtres et séminaristes, Chers Amis,

Nous sommes dans la joie de célébrer ce matin la fête de sainte Pétronille, en cette Basilique Saint-Pierre, Église du successeur de l’apôtre Pierre, notre Pape Benoît XVI, qui a reçu la charge donnée par Jésus à Pierre, de confirmer ses frères dans la foi, et que nous assurons, au milieu des pénibles épreuves que nous partageons avec lui, de notre filiale affection et de notre fervente prière. C’est bien la foi de Pierre qui nous réunit en cette eucharistie. Car, de Pétronille, nous ne savons pratiquement rien, si ce n’est, pour le dire avec les mots enchanteurs de notre poète Victor Hugo, l’histoire écoutée aux portes de la légende.



Pétronille, vierge romaine, nous est connue par une inscription apposée sur son sarcophage, dans la catacombe de Domitille, à la mémoire de Petronillae, "filiae dulcissima", rapidement attribuée à saint Pierre. Alors que les rapports se resserrent entre le Siège apostolique et la nation franque, et que le domaine temporel de Saint-Pierre est menacé par les Lombards, les papes Etienne II et Paul Ier se tournent vers la France. Une alliance est conclue sous le signe de Pétronille, qui personnifie dès lors la France chrétienne. Pétronille étant, selon la croyance du temps, la fille de saint Pierre, la France devient la "fille aînée de l’Eglise". A ce titre, Pépin le Bref demande au pape que le corps de Pétronille soit porté au Vatican, qu’un sanctuaire y perpétue son culte, et qu’on y prie pour la nation franque. Ce beau symbole devient le gage des bons rapports entre la France et la Papauté. De fait, alors que les vicissitudes des temps voient se succéder les royautés, les empires et les républiques, ces rapports se sont affirmés et affermis, au milieu même des turbulences récurrentes, au point que le cardinal Secrétaire d’Etat de Jean XXIII, le premier que j’ai servi, voici un demi-siècle, Domenico Tardini, dira, il m’en souvient, à l’un de ses collaborateurs qui appelait à sévir contre je ne sais quels errements : « Caro mio, mon cher, malgré les apparences, le Saint-Siège n’a jamais eu et n’aura jamais d’allié plus sincère que la France ». Les peuples, comme les personnes, ont une âme et une vocation à remplir au cours de leur histoire. Et sans nul doute, l’exceptionnel rayonnement de la France au travers de deux millénaires s’enracine dans sa vocation chrétienne, nous nous devons de nous le rappeler, alors qu’une sécularisation galopante teintée de sécularisme est porteuse de « La Décroyance » amnésique et ravageuse que j’ai tenté d’identifier dans un livre récent. (Ed. L’Echelle de Jacob, Dijon, 2012).

La mémoire est l’espérance du futur. Le 1er juin 1980, le jeune pape Jean-Paul II, que je venais d’accueillir à l’Institut catholique de Paris et que j’accompagnais au Bourget, sous les rafales de vent froid et de pluie glacée, nous interpellait avec force. Après un développement saisissant sur l’alliance de l’homme avec la sagesse, qui est la source de la culture, et sur l’effondrement de cette alliance, Jean-Paul II concluait par cette adjuration pathétique : « Il n’existe qu’un problème, celui de notre fidélité à l’alliance avec la sagesse éternelle, qui est source d’une vraie culture, c'est-à-dire de la croissance de l’homme, et celui de la fidélité aux promesses de votre baptême au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Alors permettez-moi , pour conclure, de vous interroger : France, fille aînée de l’Eglise, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? Permettez-moi de vous demander : France, fille aînée de l’Eglise et éducatrice des peuples, es-tu fidèle, pour le bien de l’homme, à l’alliance avec la sagesse éternelle ? Pardonnez-moi cette question. Je l’ai posée comme le fait le ministre au moment du baptême ? » La pluie tombait sur le Bourget, le vent s’était levé. La mitre ôtée, la calotte enlevée, Jean-Paul II, la mèche de cheveux voltigeant sur le front volontaire, martelait ses mots en soulevant son texte, seul, en avant du podium, comme le capitaine à la proue du navire.

Quelques heures plus tard, il s’adresse sans détours aux évêques réunis dans la chapelle du Grand Séminaire d’Issy les Moulineaux. A trente ans de distance, j’entends encore sa voix puissante résonner sous les voûtes sulpiciennes, au terme d’un vigoureux appel à surmonter la tentation du refus de Dieu par l’homme au nom de sa propre humanité. « Cela crée beaucoup de devoirs. Le chemin vers l’avenir de l’Eglise en France passe par l’acceptation de ces devoirs. Mais, face aux négations qui sont le fait de beaucoup, face aux désespoirs qui, à la suite de nombreuses vicissitudes historiques, semblent former le visage spirituel de la société contemporaine, ne nous reste-t-il pas toujours la même puissante ossature de l’Evangile et de la sainteté, qui constitue un patrimoine particulier de l’Eglise en France ? Le christianisme n’appartient-t-il pas de façon immanente au génie de votre nation ? La France n’est-elle pas toujours la fille aînée de l’Eglise ? » La même question était posée, avec la même vigueur, et une insistance nouvelle. Nous pouvons bien, me semble-t-il, en cette eucharistie célébrée pour la France à Saint-Pierre, nous interroger en vérité sur notre réponse.

Depuis lors, infatigable pèlerin apostolique, le Bienheureux Jean-Paul II n’a cessé de reconduire la France à ses sources de sainteté, sur les pas de sainte Thérèse de Lisieux, de Notre Dame de Lourdes, de saint Irénée à Lyon, de saint François de Sales à Annecy, de sainte Marguerite-Marie à Paray le Monial, de sainte Odile à Strasbourg, de sainte Anne d’Auray, de saint Martin à Tours, et bien sûr de saint Rémi de Reims, pour le quinzième centenaire du baptême de Clovis.

A sa suite, notre pape Benoît XVI s’est fait lui aussi pèlerin de Notre Dame de Paris et de Notre Dame de Lourdes. Et je l’entends encore à l’Elysée, le 12 septembre 2006, répondre avec chaleur aux paroles d’accueil du Président de la République, en saluant « tous ceux et toutes celles qui habitent ce pays à l’histoire millénaire, au présent riche d’évènements et à l’avenir prometteur. Qu’ils sachent que la France est très souvent au cœur de la prière du Pape, qui ne peut oublier tout ce qu’elle a apporté à l’Eglise au cours des vingt derniers siècles ! » Et notre Saint-Père d’ajouter : « Il est en effet fondamental, d’une part, d’insister sur la distinction entre le politique et le religieux, afin de garantir aussi bien la liberté religieuse des citoyens que la responsabilité de l’Etat envers eux, et, d’autre part, de prendre une conscience plus claire de la fonction irremplaçable de la religion pour la formation des consciences et de la contribution qu’elle peut apporter, avec d’autres instances, à la création d’un consensus éthique fondamental dans la société… Je vous assure de ma fervente prière pour votre belle nation, afin que Dieu lui concède paix et prospérité, liberté et unité, égalité et fraternité… Que Dieu bénisse la France et tous les Français ».

Il nous est bon, au cœur de cette célébration eucharistique pour la France en cette Basilique Saint-Pierre, pour la fête de sainte Pétronille, de méditer ces paroles des Papes Jean-Paul II et Benoît XVI, qui attestent la pérennité millénaire des liens tissés entre Rome et la France sous l’égide de sainte Pétronille, et évoqués avec ferveur par le Bienheureux Jean-Paul II le 20 décembre 1979 : « Les successeurs de Pierre se sont tournés vers la France à de multiples périodes de son histoire, et la France a tenu, aussi bien dans le monde que dans l’Eglise universelle, et tient toujours, différemment peut-être, une place particulière qui suscite à la fois une grande estime, une confiance solide, des attentes renouvelées et exigeantes.» En concluant son fameux discours sur la vocation de la nation française dans la Chaire de Notre Dame de Paris, le 14 février 1841, le Père Lacordaire lançait ce vibrant appel : « Il ne suffit pas de répondre à sa vocation. Il faut persévérer. »

« France, mère de saints au long de tant de générations et de siècles », s’exclamait le Bienheureux Jean-Paul II, il m’en souvient, à Notre Dame de Paris. En cette fête de sainte Pétronille, nous les invoquons avec ferveur, et, avant de chanter le traditionnel "Domine Salvam fac Galliam", nous méditons les lectures de la Parole de Dieu que nous venons d’entendre proclamer en cette eucharistie.

Le visionnaire de Patmos, en rassurant les communautés chrétiennes persécutées, nous invite nous aussi à l’espérance, comme le faisait le Saint-Père le 21 mai dernier au terme de sa rencontre conviviale avec les cardinaux, après avoir évoqué en termes augustiniens la lutte éternelle entre le bien et le mal, dont l’histoire est le champ clos, et où l’Eglise se situe toujours en première ligne dans ce conflit permanent. « J’entendis, ce sont les mots de saint Jean, une voix puissante clamer dans le ciel : désormais, la victoire, la puissance et la royauté sont acquises à notre Dieu, et la domination à son Christ… Soyez donc dans la joie, vous, les cieux et leurs habitants. » C’est la victoire des martyrs qui ont donné leur vie à la suite de l’Agneau immolé. Et l’apôtre Pierre nous invite à « être toujours prêts à répondre avec douceur et respect à quiconque nous demande raison de notre espérance.»

Jésus lui-même nous l’avait dit, avec ces paroles de feu rapportées par l’évangéliste Matthieu : « N’allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive », ce glaive qu’est la Parole de Dieu, plus tranchante qu’une épée à deux tranchants, qui divise, en nous appelant à trancher ce qui nous relie au vieil homme pécheur et nous invite à nous mettre à la suite du Christ et à le préférer à tout, même à nos liens familiaux. C’est l’enseignement de la règle de saint Benoît que notre Saint-Père Benoît XVI a voulu commenter au premier jour de son ministère pétrinien, en expliquant le choix qu’il avait fait de s’appeler Benoît : ne rien préférer au Christ. Le Royaume de Dieu ne s’acquiert pas par les valeurs périssables de l’avoir, du savoir et du pouvoir : « Qui aura trouvé sa propre vie la perdra et qui aura perdu sa vie à cause de moi la trouvera », comme l’apôtre Pierre, sainte Pétronille, et tous les saints martyrs que nous vénérons et que nous prions en cette heure difficile, pour nous-mêmes et pour notre pays, pour l’Eglise et pour le monde. Amen (1 juin 2012)

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